Un jour nouveau s’est précipité vers moi, il fait clair dehors. Il n’y a pas de vent, le ciel est gris et mon humeur est morose comme toujours depuis quelque temps. Avez-vous remarqué combien le temps est présent dans nos mots, nos pensées, notre journée, nos nuits, bref dans notre quotidien. Rien ne se fait sans lui. Rien ne se construit sans lui. Même l’énergie a nécessairement besoin de lui pour exprimer son mouvement dans l’espace. Mais l’énergie peut-elle se mouvoir ? Lequel d’entre vous l’a vue, perçue tout au moins ? Physiquement, elle existe, tout l’exprime dans l’univers. Même notre mental a besoin de sa présence pour diffuser les pensées qui lui parviennent. Une radio ne peut reproduire aucun son sans énergie. Et notre cœur, ne palpite-t-il pas grâce à elle ? Tout comme son ami le temps, l’énergie est un mystère de l’univers. Seulement eux ?

Où que je tourne mon regard, je peux observer la présence de l’énergie. Et pourtant, quelle que soit la direction où se tourne mon regard, ce ne sont que des formes que je vois, des formes qui l’animent, des formes qui la contiennent. Même les plus petites particules de cet univers ne sont que des réceptacles énergétiques. Et ces formes se meuvent réagissant aux différentes lois de l’univers, elles s’attirent, se repoussent telle une respiration, créant ainsi le mouvement. Mais comment percevons-nous ce mouvement ? c’est là que notre ami le temps apparaît. Les formes produisent l’espace, transportent l’énergie d’un bout à l’autre de cet espace et le temps génère en nous la perception de l’espace et du mouvement. Il s’agit d’une triangulation qui ne peut se défaire car sans un de ces éléments, rien autour de nous ne se mentaliserait et donc existerait en nous.

Le mouvement est la représentation physique du temps dans notre dimension mais aussi dans toutes les dimensions de notre évolution. Nous connaissons bien peu de chose du « Tout », mais nous percevons déjà que l’énergie et le temps sont transverses à tous les espaces de notre vie. Quelle que soit la nature de la forme, elle n’a qu’un rôle, exprimer l’énergie des univers. Quel que soit le mouvement, il n’a qu’un rôle, exprimer le temps. L’énergie et le temps sont des absolus.

Pour l’observateur, le temps est particulier, sujet à désaccord. L’analyse de notre quotidien montre que nous avons plusieurs façons de le mesurer. De notre connaissance, il y a le temps collectif, celui de nos horloges qui se calle sur la rotation de la Terre, le temps psychique, celui de l’homme, très personnel et différent d’un individu à l’autre. Il existe d’autres temporalités que nous ne connaissons pas, mais qui un jour nous seront familières, des espaces contraires à l’expression du temps, d’autres où le temps est achevé, tout y étant déjà vécu… 

Souvent les deux temporalités, celle de l’espace terrestre, le temps collectif, et celle du plan mental, le temps individuel, se rejoignent, puis rapidement s’éloignent l’une de l’autre. Si je regarde par la fenêtre avec mon état d’esprit actuel, morose, je dirai que le temps s’étire en longueur alors que l’horloge sonne déjà 11h00. Je n’ai pas vu le temps défiler. Je suis déphasée du temps terrestre, du temps collectif. Qu’est-ce qui est à l’origine de ce décalage ? Ma conscience ? Elle peut refuser de laisser le temps se réaliser, elle freine son entrée dans un futur que, peut-être, elle a perçu et ne veut pas vivre ! Mais peine perdue, le futur est déjà vécu. Elle souhaite peut-être conserver encore son présent et se languir dans ce temps qui s’étire. Parfois, ma conscience saute des espaces parcourus par le temps pour rejoindre son futur, là où son essence est, là où notre essence réalise notre vie. 

Ecrire ainsi ce qui traverse votre esprit sans chercher à le retenir, à modifier les mots, est un exercice intéressant. Soudain, vous voyez des évidences qui ne vous avaient pas frappé auparavant. J’ai parlé de « temps qui s’étire ». Ne saisissez-vous pas la similitude de l’expression avec celle de l’expansion de l’univers. Les formes se repoussent et amènent l’espace à s’étirer. Le temps s’expanserait-il lui aussi ou est-ce ma conscience qui étire le temps ? Le temps n’existe pas dans l’espace physique, il reste un élément subjectif, sans support matériel. L’énergie a une multitude de supports physiques, ce sont les formes qui la contiennent alors que le temps, lui, demeure un postulat de l’homme pour comprendre le mouvement. 

Peut-on remplacer le temps par la durée, comme la durée de la vie par exemple, ce qui me semble plus concret ? Les mots sont différents, je ne les confonds pas. La durée manifeste le temps que mettent les formes pour exprimer l’espace. Elle ne peut se dissocier de la distance parcourue. Le temps nous captive, nous ne le touchons pas, ni ne le voyons. Nous pouvons seulement nous accorder sur ses différentes expressions comme la durée, le mouvement. 

Si ma conscience est à l’origine de l’expansion du temps, alors il est une évidence, l’espace se déploie parce que ma conscience étire le temps. Voilà un support de réflexion intéressant.

Vous vous questionnez, car j’ai parlé de temporalités inconnues de nous. Pourquoi le temps doit-il rester aussi conforme à l’approche conventionnelle que nous en avons ? Parce que nos équations ne peuvent encore le transcrire autrement ? Une durée est positive, une durée peut-elle être exprimée négativement ? La physique a bien mis en évidence ce qui nous aurait paru auparavant comme impossible à déterminer, nos croyances faisant barrage. Alors, il est clair que si nous restons figés dans des équations qui montrent un unique mouvement comme, par exemple, celui qui part du passé et se dirige vers le futur, nous passerons à côté de découvertes majeures pour l’évolution de nos communautés. Certains de nos scientifiques sont en contact permanent avec l’intelligence et sortent des schémas collectifs du monde pour explorer des terres inconnues de la science qui parviennent déjà au regard de néophytes, même s’ils ne sont pas des scientifiques avérés et qu’ils ne peuvent pas expliquer ce qu’ils voient. D’ailleurs, toutes explications colorent la réalité qui ne se transmet là qu’à travers notre moule personnel qui, lui-même, a du mal à rester objectif. Les influences qui s’activent en nous perturbent les champs énergétiques avec lesquels l’intelligence de l’univers nous instruit. Demeurons modestes face à cette immensité ! 

Contrairement à ce que je dis, j’écris parce que je ne suis pas humble et que je bouillonne au fond de moi de tant de choses qui me traversent. Que ces informations soient incomplètes dans leurs expressions, incompréhensibles par nos esprits, incompatibles avec ce que nous savons, irréalisables, ici, maintenant, dans nos petites vies, mon esprit me pousse à l’écriture et tant pis, si cela fait rire et tant mieux si cela questionne. Je ne suis pas maître de la plume, le mental reçoit, se fige incapable de retenir les mots qui le parcourt.

Mumm ! Le café coule et l’odeur vient titiller mes narines. Il y a de bons moments dans notre vie quand même ! Un café, le matin, certains le dégustent attablés au comptoir d’un bar et rien ne pourrait déranger ce rituel sauf, peut-être, ce virus irrespectueux de nos habitudes de vies et qui a pénétré notre monde en conquérant. Attention, les hommes sont belliqueux quand il s’agit de leur vie. Tout va rentrer dans l’ordre collectif, ce n’est qu’une question de temps, mais nous avons pu voir combien étaient si fragiles nos sociétés. Nous retournerons bientôt nous attabler à nos bistrots pour sentir l’odeur pénétrante du café et nous réjouir de l’amertume qui se répand dans notre bouche.

Mumm ! délicieux, comme je l’aime, ma morosité matinale s’est envolée, je vais pouvoir commencer ma journée, fermer mon ordinateur et laisser mon écrit en suspens jusqu’à demain. 

Avant de fermer l’ordinateur, j’écris ces mots : « La fissure temporelle ».